Page:Le Parnasse contemporain, II.djvu/270

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LA RETRAITE


Sur la place Vendôme, un soir de paix profonde,
J’entendis de tambours un roulement si grand,
Que, tout à coup, moi-même à l’unisson vibrant,
Je crus que l’on partait pour conquérir le monde !

Lancée aux quatre vents, la fanfare qui gronde
M’emmène avec un bruit déjà moins enivrant.
Nous marchons ; mais bientôt, de mon orchestre errant,
Chaque instrument s’éloigne & se perd à la ronde.

Longtemps j’en suivis dix, & cinq, & deux, puis un…
Dans la nuit taciturne, il eut le sort commun,
Et je m’en revins seul, l’âme sombre & distraite.

Maintenant je me dis, songeant à ces tambours
Mêlés dans ma pensée à d’autres échos sourds :
« Ainsi mes rêves d’or ont sonné la retraite ! »