Page:Le Parnasse contemporain, II.djvu/357

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Son front morne enfin se soulève ;
Mais quand il voit ces traits chéris,
Il se croit le jouet d’un rêve
Et referme ses yeux surpris.

Puis il les rouvre, &, sans rien dire,
Lentement s’accoude, & soudain,
Pour voir si vraiment il délire,
Au cher fantôme il tend la main.

O joie ! Il sent une main brune,
Brune, mais fine, où le soleil,
L’eau des puits, l’air de la lagune,
Ont laissé leur baiser vermeil.

Il la prend, l’étreint & la pose
Sur son cœur satisfait enfin.
Alors de sa paupière close
Jaillissent de longs pleurs sans fin.

« Mon fils, qu’as-tu ? lui dit sa mère,
Calme-toi, n’es-tu pas heureux ?
As-tu quelque autre peine amère ?
Dis-nous encor ce que tu veux ?

— Je ne veux rien, plus rien au monde,
Ni même dans l’éternité,
Rien que cette ivresse profonde
Que je savoure à son côté !