Page:Le Play, L’Organisation De La Famille, 1884.djvu/108

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point de vue, il fallait donc, pour affermir la révolution, détruire l’autorité que les pères puisaient dans le testament. Les hommes de la Terreur crurent atteindre ce but en exagérant l’ancien privilège d’aînesse : ils attribuèrent à tous les enfants, sur l’héritage de leurs parents, les droits qui, sous le régime féodal, n’appartenaient qu’à l’aîné. Ce motif n’avait pas plus de précédents que la loi elle-même dans l’histoire des peuples civilisés. Cependant il n’en fut point allégué d’autres dans le compte rendu officiel de la séance du 7 mars 1793[1]. On s’explique d’ail-

  1. Les extraits consignés ci-après mettent en complète évidence les idées antisociales qui firent abroger la plus vénérable coutume des peuples civilisés, et qui étonnèrent les réclamations que cette funeste décision suscita immédiatement, même parmi les partisans de la révolution.
    Extrait du Moniteur. (Séance du 7 mars 1793.) — « N… demande que les testaments faits en haine de la révolution soient abolis. — Mailhe dit qu’il faut remonter à la source du mal. Il constate que beaucoup de pères ont testé contre des enfants qui se sont montrés partisans de la révolution. – Prieur:Je demande que la loi se reporte en juillet 1789. Sans cela, vous sacrifiez les cadets voués à la révolution; vous sanctionnez la haine des pères pour les enfants patriotes. — N… Je demande au moins qu’on abolisse à dater de ce jour. »
    Jamais on n’avait vu, chez un peuple civilisé, des intérêts aussi grands tranchés par de si faibles raisons. Ce texte du Moniteur est la plus évidente condamnation de la loi, qui fut arrachée par la Terreur à une majorité pusillanime, qui détruisit les institutions datant de vingt-cinq siècles (§ 9), qui, depuis lors, en propageant la stérilité dans le mariage, a plus affaibli la France que ne l’eût fait la perte de cent batailles.
    Extrait du Moniteur. (séance du 28 décembre 1793.) — « La loi sur l’égalité des partages a déjà occasionné beaucoup de dés-