Page:Le Roman de Tristan et Iseut, renouvelé par J. Bédier.djvu/103

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la reine : c’est vérité prouvée, et déjà l’on en dit mainte parole. »

Le noble roi chancela et répondit :

« Lâche ! Quelle félonie as-tu pensée ! Certes, j’ai placé mon cœur en Tristan. Au jour où le Morholt vous offrit la bataille, vous baissiez tous la tête, tremblants et pareils à des muets ; mais Tristan l’affronta pour l’honneur de cette terre, et par chacune de ses blessures son âme aurait pu s’envoler. C’est pourquoi vous le haïssez, et c’est pourquoi je l’aime, plus que toi, Andret, plus que vous tous, plus que personne. Mais que prétendez-vous avoir découvert ? qu’avez-vous vu ? qu’avez-vous entendu ?

— Rien, en vérité, seigneur, rien que tes yeux ne puissent voir, rien que tes oreilles ne puissent entendre. Regarde, écoute, beau sire ; peut-être il en est temps encore. »

Et, s’étant retirés, ils le laissèrent à loisir savourer le poison.

Le roi Marc ne put secouer le maléfice.