Page:Le Roman de Tristan et Iseut, renouvelé par J. Bédier.djvu/49

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viennent nos serfs. Pourtant, — et je n’excepte que toi seul, roi Marc, ainsi qu’il convient, — si quelqu’un de tes barons veut prouver par bataille que le roi d’Irlande lève ce tribut contre le droit, j’accepterai son gage. Lequel d’entre vous, seigneurs cornouaillais, veut combattre pour la franchise de ce pays ? »

Les barons se regardaient entre eux à la dérobée, puis baissaient la tête. Celui-ci se disait : « Vois, malheureux, la stature du Morholt d’Irlande : il est plus fort que quatre hommes robustes. Regarde son épée : ne sais-tu point que par sortilège elle a fait voler la tête des plus hardis champions, depuis tant d’années que le roi d’Irlande envoie ce géant porter ses défis par les terres vassales ? Chétif, veux-tu chercher la mort ? À quoi bon tenter Dieu ? » Cet autre songeait : « Vous ai-je élevés, chers fils, pour les besognes des serfs, et vous, chères filles, pour celles des filles de joie ? Mais ma mort ne vous sauverait pas. » Et tous se taisaient.