Page:Le Roman de Tristan et Iseut, renouvelé par J. Bédier.djvu/53

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pre ; la barque de l’Irlandais se détacha de l’île, et une clameur de détresse retentit : « Le Morholt ! le Morholt ! » Mais, comme la barque grandissait, soudain, au sommet d’une vague, elle montra un chevalier qui se dressait à la proue ; chacun de ses poings tendait une épée brandie : c’était Tristan. Aussitôt vingt barques volèrent à sa rencontre, et les jeunes hommes se jetaient à la nage. Le preux s’élança sur la grève, et, tandis que les mères à genoux baisaient ses chausses de fer, il cria aux compagnons du Morholt :

« Seigneurs d’Irlande, le Morholt a bien combattu. Voyez : mon épée est ébréchée, un fragment de la lame est resté enfoncé dans son crâne. Emportez ce morceau d’acier, seigneurs : c’est le tribut de la Cornouailles ! »

Alors il monta vers Tintagel. Sur son passage, les enfants délivrés agitaient à grands cris des branches vertes et de riches courtines se tendaient aux fenêtres. Mais, quand parmi les chants d’allégresse, aux