Page:Le Salmigondis tome 1 1835.djvu/141

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quand les yeux vigilans du vieux capitaine et du contre-maître étaient fermés, il la conduisait sur le tillac pour y respirer un air pur et frais. Là elle lui donnait la seule récompense qui fut en son pouvoir, le plaisir d’entendre sa douce voix ; et Frank disait que les vents cessaient de murmurer dans les voiles pour l'écouter. En de certains momens, dans le silence absolu qui régnait autour d’eux, ces deux êtres portés doucement sur les vagues au milieu de l'immense Océan, se sentaient comme seuls dans l'univers.

En de tels instans, Frank éprouvait un désir irrésistible de connaître les événemens de la vie de cette Perdita, que le ciel, comme il en avait l'entière persuasion, avait confiée à ses soins. Il se hasarda une fois à traiter ce sujet qui touchait si intimement son cœur, en disant à la jeune fille : « Vous m’avez ordonné de vous nommer Perdita ; mais je n’aime point ce nom, il rappelle trop, à mon avis, ces romans emphatiques qui tournent la tête des jeunes filles et les portent à se lancer sans cartes ni boussoles à la recherche des mondes inconnus. » Il s’arrêta, hésita : il était évident qu’il avait pris un détour pour éviter d’avouer directement ce qu’il souhaitait. Enfin, après un