Page:Le Salmigondis tome 1 1835.djvu/384

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Pendant l’été de 1760, vers la fin d’une belle journée, un jeune homme dont la tournure et le costume indiquaient un des principaux habitans de Montréal, s’arrêta devant le portail de l’église des Récollets, pour en considérer les sculptures. Il fut tiré de la rêverie où l’avait plongé la contemplation de ces emblèmes de mortalité par le bruit d’une porte que l’on ouvrit tout près de lui, et que le moine qui en sortit, pressé de remplir quelque mission importante, négligea de refermer. Attiré par l’ombrage agréable de ces ormes superbes que la main sacrilége du prétendu perfectionnement moderne a renversés de nos jours, le jeune homme entra dans la vaste et belle cour du monastère, déposa sous l’un des arbres son épée et son chapeau orné de plumes et se disposait à se reposer un instant sur le gazon frais et touffu, lorsque, apercevant le père Clément, supérieur du couvent, il se tint debout dans une attitude respectueuse. Le moine s’avança vers lui, et le bénit avec une douce ferveur, qui montrait que son cœur était d’accord avec ses lèvres lorsqu’il implorait le ciel pour l’un de ses semblables. « Mon père, » lui dit le jeune visiteur, « je mériterais