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Page:Le Sylphe - Poésies des poètes du Dauphiné, tome 1, 1887.djvu/239

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LE SYLPHE REVUE DES ÉCRIVAINS DAUPHINOIS. MIGNARDISE —*$*,— A mon ami A. Iungblutk, graveur de marines. Dans le plus beau jardin de la reine Imagination, il était une rose pourpre gentiment penchée sur le rosier maternel, et toute humide de rosée au sein de sa fraise verte, délicatement repassée. Soudain, un vol d'oiselets siffleurs passa en battant des ailes; voyant la pauvre rose si belle, les méchants se jetèrent sur elle avec furie, lui arrachèrent une à une ses feuilles qu'ils dispersaient dans l'air avec emportement. Las! — le sol était jonché des feuilles de la rose mourante et le vent les emportait bien loin, avec un soin jaloux, pour en recueillir les suprêmes parfums. — Las ! . . . Ainsi s'est abattu sur mon cœur l'essaim espiègle et charmant des femmes que j'ai aimées. — Toutes, celles dorées aux soleils latins, comme celles qui ont sur leurs cheveux le reflet des cieux de l'Occident, les passionnées comme les mélancoliques, toutes ont ouvert en riant ma poitrine, arraché mon pauvre cœur qui palpitait, et maintenant, les voilà, folâtres, qui le partagent cruellement en mille et mille lambeaux sanglants. . . — Ombres transparentes et mutirres, qui flottez autour de ma tête aux heures noires, vous dont les yeux diaphanes ont des lueurs mystérieuses d'étoiles au matin, venez, accourez en foule prendre part à ce martyre de mon cœur, car vos blessures me sont douces, et ma douleur m'est très chère. . . — Et ceci se passait dans le plus beau jardin de la reine Imagination. Paris, janvier 1887. Léo NORE. 1er Volume. — 6e Livr.