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C’est pourquoi aussi la Religion Chrétienne enseigne et oblige de croire, sous peine de damnation et de malédiction éternelle, que Dieu, aïant bien voulu, par un excès de sa bonté et de sa miséricorde, avoir pitié et compassion de la perte de tous les hommes, causée par le péché d’Adam, et que voulant les racheter de tous leurs péchés, il a eu tant de bonté pour eux, que de vouloir bien se faire homme lui-même et mourir honteusement sur une croix[1], pour satisfaire par sa mort à sa divine justice, qui avoit été offensée par les péchés des hommes, et par ce moïen les racheter de la damnation éternelle et leur procurer en même tems une vie éternellement bienheureuse dans le ciel. Si cela est, comme la Religion Chrétienne le dit, voilà certainement un témoignage assuré de la plus grande bonté et de la plus grande miséricorde, qu’il auroit pu faire à des pécheurs, qui l’auroient si grièvement offensé par leurs péchés. Mais il est facile de faire voir les absurdités de cette doctrine.

Car premièrement, comment accorder dans un même Dieu un si grand excès de bonté et un si grand excès d’amour pour les hommes, avec si peu de soin, qu’il auroit eu, de les conserver dans leur innocence, lorsqu’ils y étoient, et avec une si grande foiblesse et une si grande fragilité, que celle dans la quelle il les auroit volontairement laissé, pour tomber si facilement et si tôt, qu’ils ont fait, dans le péché ? Car n’auroit certainement tenu qu’à lui, de leur donner assez de

  1. Deus beatos omnium, humo in fine temporum. Hymn. de ascens : Ouae te vicit clementia ut ferres nostra crimina, crudelem mortem patiens ut nos a morte tolleres. ibid.