Page:Le Testament de Jean Meslier - Tome 2, 1864.pdf/194

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si criminelles et si odieuses, s’ils en jugeoient bien, ils devroient plutôt en avoir honte.

C’est donc manifestement un abus et une injustice manifeste, de vouloir, sur un si vain et odieux fondement et prétexte, établir et maintenir une si étrange et si odieuse disproportion entre les diiférens états et conditions des hommes, qui met, comme on le voit manifestement, toute l’autorité, tous les biens, tous les plaisirs, tous les contentemens, toutes les richesses et même l’oisiveté du côté des grands, des riches et des nobles, et met du côté des pauvres peuples tout ce qu’il y a de pénible et de fâcheux, savoir la dépendance, les soins, la misère, les inquiétudes, toutes les peines et toutes les fatigues du travail ; laquelle disproportion est d’autant plus injuste et odieuse, qu’elle les met comme dans une entière dépendance des nobles et des riches, et qu’elle les rend pour ainsi dire leurs esclaves, jusques-là qu’ils sont obligés de souffrir non seulement toutes leurs rebufades, leurs mépris et leurs injures, mais aussi leurs véxations, leurs injustices et leurs mauvais traitemens. Ce qui a donné lieu à un auteur de dire, qu’il n’y avoit rien de si vil et de si abject, rien de si pauvre et de si méprisable que le païsan de France, d’autant, dit-il, qu’il ne travaille que pour les Grands et pour les Nobles, et qu’il a bien de la peine avec tout son travail de gagner du pain pour soi-même. En un mot, dit-il, les païsans sont absolument les Esclaves des Grands et des Nobles, dont ils font valoir les terres et de ceux dont ils les tiennent à ferme : ils ne sont pas moins oprimées par les taxes publiques et les ga-