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Un écrivain anglais, Howitt, fort humoristique comme le sont quelquefois les Anglais, quand ils n’ont pas le spleen, raconte d’une manière fort piquante l’opinion qu’ont les habitants du pays sur le château de Tintagel. Je traduis ce passage de son livre intitulé : Visits to remarquable places, « Visites aux lieux remarquables. »

« J’étais assis sur la hauteur de Tintagel, dit Howitt, tout entier à l’admiration des magnifiques sites qu’offre en ce point la côte ouest des Cornouailles, quand une troupe d’enfants gravit joyeusement le coteau. À ma vue, ils se regardèrent indécis, et il se fit un moment de silence.

« — Mes enfants, leur dis-je, comment appelez-vous cette colline ?

« — Ça, une colline, monsieur ; c’est Tintagel, monsieur.

« — Tintagel, fort bien ; et alors quel est ce vieux château ?

« — Ce château, monsieur ; c’est le château du roi Arthur.

« — Le château du roi Arthur ! Et quel était ce roi Arthur ? »

Les enfants se regardèrent tout étonnés ; ils étaient vifs, intelligents, éveillés, mais c’était là une question que jamais personne ne leur avait posée. La renommée du roi Arthur était si bien acceptée d’ailleurs, si bien établie dans le pays, c’était chose si naturelle, qu’il n’était jamais venu à l’idée de personne de se demander ce qu’avait été le roi Arthur. Encore plus ces enfants n’étaient-ils guère préparés à répondre.

Kynance Cove, près le cap Lizard. — Dessin de Durand-Brager.

« Le roi Arthur ! dit enfin l’un d’eux, nous ne savons rien de lui, monsieur, si ce n’est que c’était un roi.

— Un roi ! quand donc cela pouvait-il être ? Cela n’était pas d’hier. Tous nos rois, dans ces derniers temps, se sont nommés Georges ou Guillaume.

— Oh ! Dieu vous bénisse, monsieur, ce château était bâti bien avant que vous fussiez né. »

Et sur cette réponse qui leur semblait la plus lumineuse solution à la difficulté pendante, les enfants s’échappèrent riants et joyeux, et descendirent en courant et se culbutant les pentes rapides du coteau. »


VIII

LA MER ET LES MARINS DU CORNOUAILLES.


Dangers des côtes du Cornouailles. — Les phares. — Eddystone. — Les bateaux-phares. — Les life-boats. — Les brumes de la Manche. — Tout est bien qui finit bien. — Une tempête au cap Land’s end. — Le pêcheur et le marin du Cornouailles. — Parallèle avec le mineur. — La reine Zénobie et son page. — Trésors cachés.

Le voyage que nous venons d’accomplir sur les côtes du Cornouailles d’ordinaire si inhospitalières, si fécondes