Page:Le Tour du monde - 14.djvu/116

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devaient être fabriqués par eux durant notre absence et se trouver prêts à notre retour.

Je partis au petit jour avec le missionnaire. Quatre Indiens nous précédaient en éclaireurs ; deux porteurs nous suivaient, chargés de viandes boucanées et de racines cuites. Un jeune gars à la mine éveillée, destiné à nous servir, selon l’heure et le cas, d’échanson, de maître d’hôtel et de valet de chambre, gambadait joyeusement à nos côtés.

Au sortir de la mission, le chemin que nous prîmes sous bois se dirigeait à l’est-nord-est ; l’épaisseur du couvert nous déroba bientôt la vue du ciel. Nous fîmes route au milieu d’un clair-obscur que l’élévation graduelle du soleil éclaircit et brillanta de chauds reflets, mais ne put interrompre.

Le révérend P. José-Manuel Rosas.

Une remarque que j’avais eu quelquefois l’occasion de faire et dont je pus apprécier la justesse en cheminant sous les grands bois de Pevas, c’est que les voyageurs, de quelque nation qu’ils soient, et à quelque genre qu’ils appartiennent, caquettent et jacassent plus fort que les oiseaux, en entrant dans une forêt. Après un instant de marche, ils subissent à leur insu l’influence des lieux et mettent une sourdine à leurs exclamations, À mesure qu’ils vont, l’imposante majesté de ces solitudes agit de plus en plus sur eux ; bientôt envahis par un inexprimable sentiment de terreur et d’admiration, — l’horreur sacrée des bois — comme l’appelaient les anciens, les plus loquaces de la troupe, repliés sur eux-mêmes, gardent un silence profond. Ma remarque s’applique non-seulement aux voyageurs civilisés, mais aux indigènes, que la vue continuelle des mêmes lieux et la répétition des mêmes scènes, n’ont pu soustraire à leur mystérieuse influence.

Les ruisseaux-rivières avec lesquels j’avais déjà fait