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Il y a au Japon plusieurs espèces de riz. Celui de la plaine est le plus estimé ; celui des collines n’a pas besoin d’être aussi longtemps submergé que le premier. Toutefois, je l’ai vu soumettre au printemps à des procédés d’irrigation qui ont coûté beaucoup de travail, la création de réservoirs sur le plateau supérieur de la colline et l’établissement de nombreux canaux se déversant sur toutes les terrasses préparées pour la culture du riz.

L’assolement se pratique de temps immémorial dans cette contrée. Telle terrasse convertie en rizière portera, l’automne prochain, du froment ou du millet. Les Japonais pourraient encore çà et là défricher des terrains de montagne, mais ils ne laisseront jamais en jachère une terre labourable.

L’arbuste à thé ne fait pas dans nos environs l’objet d’une exploitation agricole. On le rencontre quelquefois dans certaines expositions favorables ; mais les vrais districts à thé sont à plusieurs journées au nord de la baie.

Nous sommes beaucoup plus rapprochés des districts producteurs de soie, et rien n’empêcherait que cette industrie ne se développât dans notre voisinage immédiat, s’il offrait encore la place nécessaire pour des plantations de mûriers. Il me paraît, en résumé, que la population dont je suis entouré, et peut-être généralement les habitants des côtes méridionales de Nippon, abandonnent à ceux de l’intérieur la production des articles susceptibles d’une grande exploitation industrielle, tels que la soie, le thé, et même le coton, qui n’est pas non plus très-abondant sur nos rives ; tandis qu’ils se vouent essentiellement, les uns à la pêche et au service des transports par voie d’eau, et les autres à l’agriculture proprement dite, à la production des céréales ainsi que des plantes légumineuses et oléagineuses, enfin à l’horticulture et à l’exploitation du chanvre, des pailles, des roseaux et des bambous.

Repos de campagnards. — Dessin de Émile Bayard d’après des croquis japonais.

Au milieu de la population campagnarde, à la fois humble et souriante, des fertiles vallées qui débouchent sur la baie de Yédo, l’on rencontre fréquemment des hommes d’une race plus vigoureuse, dont l’aspect d’ailleurs bienveillant semble dénoter une certaine indépendance de caractère ou de genre de vie. Ce sont des gens de la montagne, c’est-à-dire des habitants de la chaîne des monts Akoni, au pied du Fousi-yama. Les affaires qui les appellent dans la plaine sont de nature très-diverse : pour les uns, ce sera l’exploitation ainsi que le flottage des bois de marine et de bâtisse ; pour d’autres, le commerce du charbon de bois ; ceux-ci ont une entreprise de transport de marchandises à dos de cheval, des provinces de l’intérieur à tel ou tel port de la baie ; ceux-là sont employés au halage des barques qui uti-