Page:Le Tour du monde - 14.djvu/60

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Pour sortir de cet état, il fallait se soumettre aux formalités de l’expiation pendant un temps plus ou moins prolongé, selon la gravité du cas. Elles consistaient, pour les hommes, à se laisser croître la barbe et les cheveux et à se couvrir la tête d’un vulgaire chapeau de paille ; pour les femmes, à se coiffer d’un mouchoir d’étoffe blanche ; pour les uns et les autres, à s’enfermer dans leurs appartements ou entreprendre un pèlerinage, et à s’abstenir de certains mets et de toute distraction bruyante.

La réintégration du pénitent dans le cercle de sa famille et de ses amis était l’occasion de grandes réjouissances, accompagnées d’une purification générale de sa demeure par le sel et par l’eau, sans préjudice d’un grand feu allumé dans la cour.

Pélerins japonais. — Dessin de A. de Neuville d’après une photographie.

Les fêtes anniversaires instituées en l’honneur des principaux Kamis du Japon ne comportent pas d’autres rites sacrés que des cérémonies de purification, et encore celles-ci n’y furent-elles introduites que vers la fin du huitième siècle.

La veille de la grande solennité, les prêtres se rendent en procession, à la lueur des flambeaux, au temple où l’on garde dans une châsse précieuse, appelée mikosi, les armes et divers autres objets qui ont appartenu au héros divinisé. Le mikosi représente, selon la fiction cléricale, l’habitation terrestre du Kami, le trône qu’on lui conserve dans sa patrie. Mais, chaque année, on doit le soumettre à une purification radicale. On dépouille donc la châsse de ses reliques et on la porte à la rivière. Tandis qu’un certain nombre de prêtres la lavent avec soin, d’autres allument de grands feux pour écarter les génies malfaisants, et la Kagoura, le chœur sacré, apaise par ses instruments et ses chants l’esprit du Kami, qui est momentanément privé de sa résidence terrestre. Cependant l’on ne tarde pas à la lui rendre, ce qui s’exprime en réintégrant solennellement dans la châsse les reliques jusqu’alors exposées dans le cortége. Seulement, comme le temple lui-même doit être aussi