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plète ; cependant lorsqu’ils sortent avec leur maître, ils chaussent des sandales, endossent une légère jaquette bleue et se coiffent d’un mouchoir de même couleur. L’un de nos bêtos est marié, et chaque matin, au lever du soleil, fièrement campé à côté du puits, il fait ruisseler tour à tour des seaux d’eau fraîche sur sa femme, ses enfants, son cheval et soi-même.

Après les écuries vient le chenil, habité par une paire de lévriers, un chien courant, un chien de garde et un roquet ; puis la basse-cour, pleine de coqs, de poules, d’oies et de canards, d’espèces indigènes.

Enfin nous atteignons les demeures du comprador, des cuisiniers et des coskeis. Le premier est ce que les Japonais appellent un Nankingsan, un homme de Nankin, ou, comme ils s’expriment aussi par abréviation, tout simplement un Nankin, c’est-à-dire un Chinois.

Bêtos (palefreniers). — Dessin de A. de Neuville d’après une photographie.

Notre Nankin porte son costume national, y compris une tresse dont il est fier, car elle descend jusqu’aux jarrets. Les fonctions du comprador sont en général celles d’un maître d’hôtel. Dans tout l’extrême Orient, les Européens les remettent d’ordinaire entre les mains des Chinois, qui ont le génie de la cuisine, du marché et de l’office, en y joignant, bien entendu, l’art de faire danser l’anse du panier. Nos cuisiniers sont indigènes et pratiquent, sous notre haute surveillance, un ingénieux éclectisme emprunté aux écoles culinaires de l’Europe, de l’Inde, de la Chine et du Japon. Je crois que l’un d’eux tient aussi ménage dans quelque recoin de la colonie.

Nous avons pour sommeliers deux Javanais, nommés Siden et Sariden, et un petit Chinois de la secte des Taïpings, portant les cheveux longs et coupés en rond derrière la tête, à la manière des Malais. Il répond au nom de Rebelle. Les désastres de la grande rébellion