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Embouchure de la rivière Nanay.


VOYAGE DE L’OCÉAN PACIFIQUE À L’OCÉAN ATLANTIQUE,

À TRAVERS L’AMÉRIQUE DU SUD.


PAR M. PAUL MARCOY[1].


1848-1860. — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.




PÉROU.


ONZIÈME ÉTAPE.



La rivière Nanay et ses indigènes. — Oran-Pucallpa. — Où il est question de M. de La Condamine et de ses mesures de la rivière Napo. — L’Îlot d’Ambiacu. — La Mission de Pevas. — Les frères lais. — Historique de la Mission. — L’Enfant géophage. — Les Orejones d’Ambiacu. — Départ du voyageur pour la Mission de San José de los Yahuas.

La plus grande circonspection préside aux rapports que les habitants du faubourg no 13 ont avec ceux du faubourg no 19. En leur qualité de descendants d’Espagnols, les premiers se donnent entre eux les titres de don et de doña, se considèrent comme de race blanche, bien que la couleur de leur teint varie entre la feuille morte et la brique cuite, et croiraient déroger en frayant avec des Peaux-Rouges. Ces représentants de l’aristocratie d’Iquitos, portent la chemise courte et le pantalon de cotonnade bleue, se coiffent de chapeaux de paille qu’ils fabriquent eux-mêmes et vont habituellement nu-pieds faute de chaussure. Tous cultivent, pour vivre, un petit coin de terre.

Les Iquitos, croisés d’Omaguas-Cocamas et de Ticunas qui peuplent le village, ne sont pas les seuls représentants de leur race. À deux lieues de là, sur les bords de la rivière Nanay, affluent de gauche de l’Amazone, il est des Iquitos pur sang que le baptême n’a pas encore purifiés de leur souillure originelle. Les riverains de la contrée, enclins à l’exagération et à l’hyperbole, accusent ces païens de manger leurs défunts et même de mordre un peu à leurs vivants. Mais comme à l’appui de leur dire ils ne donnent aucune preuve, jusqu’à ce que le fait ait été certifié, nous engageons le lecteur à prendre comme nous cette médisance pour de la calomnie.

La réputation d’anthropophagie que les gens de l’endroit ont faite aux Iquitos infidèles, n’empêche pas les Iquitos chrétiens d’entretenir avec eux des relations de commerce et d’amitié, de les admettre à leur table et de boire avec eux à la même coupe. Il ne se passe guère de semaine qu’un de ces prétendus mangeurs de chair humaine n’apparaisse dans le village en compagnie de sa moitié. Une poignée de salsepareille ou un hamac

  1. Suite. Voy. t. VI, p. 81, 97, 241, 251, 213 ; t. VII, p. 225, 241, 257, 213, 289 ; t. VIII, p. 97, 113, 129 ; t. IX, p. 129, 145, 161, 177, 193, 209 ; t. X, p. 129, 145, 161, 177 ; t. XI, p. 161 177, 193, 209. 225 ; t. XII, p. 161, 177, 193, 209 ; t. XIV, p. 81 et la note 2.