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Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 2, trad Mardrus, 1916.djvu/280

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les mille nuits et une nuit

Puis le khalifat plia la lettre et la cacheta et, sans en révéler le contenu à Ali-Nour, il la lui remit. Et Ali-Nour prit la lettre, la porta à ses lèvres, puis à son front, la mit dans son turban et, à l’heure même, il sortit pour s’embarquer à destination de Bassra, tandis que la douloureuse Douce-Amie fondait en larmes dans son coin, abandonnée.

Voilà, pour le moment, ce qu’il en est d’Ali-Nour. Mais, pour ce qui est du khalifat, voici !

Lorsque le cheikh Ibrahim, qui, pendant tout ce temps, n’avait rien dit, vit tout cela, il se tourna vers le khalifat, qu’il prenait toujours pour Karim le pêcheur, et lui cria : « Ô le plus misérable d’entre les pêcheurs ! tu nous as apporté deux ou trois poissons qui valent à peine vingt moitiés de cuivre et, non content d’avoir empoché trois dinars d’or, tu veux maintenant prendre pour toi cette jeune esclave ! Misérable ! tu vas tout de suite me donner au moins la moitié de l’or ; et, quant à l’esclave, nous la partagerons aussi, et c’est moi qui commencerai, et toi après seulement ! »

À ces paroles, le khalifat s’approcha vivement de l’une des fenêtres, après avoir lancé un regard terrible à cheikh Ibrahim, et frappa ses mains l’une contre l’autre. Aussitôt Giafar et Massrour, qui n’attendaient que ce signal, accoururent dans la salle ; et, sur un signe du khalifat, Massrour se précipita sur cheikh Ibrahim et l’immobilisa. Quant à Giafar, qui tenait à la main une magnifique robe qu’il avait envoyé chercher en toute hâte par l’un de ses serviteurs, il s’approcha du khalifat, le dévêtit des loques du pêcheur et lui mit la robe de soie et d’or.