Aller au contenu

Page:Le livre des mille nuits et une nuit, Tome 2, trad Mardrus, 1916.djvu/52

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ture du Koran fut terminée, on tendit la nappe, on rangea les mets et on apporta tout ce qu’il fallait pour le festin. Or, entre autres choses sur la nappe, il y avait un plat à l’ail, nommé rozbaja, qui a une grande réputation et qui est fort délicieux surtout si le riz qui en fait la base est bien à point et si l’ail et les aromates qui l’assaisonnent sont à la dose voulue. Alors, nous tous, les invités, nous commençâmes à en manger avec un grand appétit, excepté l’un de nous qui refusa absolument de toucher à ce plat de rozbaja. Et comme nous le pressions fort d’en goûter ne fût-ce qu’une bouchée, il jura qu’il n’en ferait rien. Alors nous redoublâmes nos instances ; mais il nous dit : « De grâce ! assez me presser de la sorte. J’ai été assez éprouvé comme cela, pour une fois que j’ai eu le malheur d’y goûter. Et il nous récita cette strophe :

« Si tu ne veux plus reconnaître ton ancien ami, et si tu le veux éviter, ne perds point ton temps à user de stratagèmes : fuis-le ! »

Alors nous ne voulûmes pas insister davantage. Mais nous lui demandâmes : « Par Allah ! et quel est donc le motif qui t’empêche de manger de cette délicieuse rozbaja ? » Il répondit : « J’ai fait le serment de ne manger de rozbaja qu’après m’être lavé les mains quarante fois de suite avec de la soude, quarante fois avec de la potasse et quarante fois avec du savon, en tout cent vingt fois. » Alors le maître de la maison ordonna à ses serviteurs d’apporter sur l’heure de l’eau et les choses qu’avait demandées