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L’ENTHOUSIASME

— Oui, de ma fenêtre, je ne vous voyais pas rentrer et cela m’inquiétait à la longue.

Je ne réfléchis point à l’aveu de surveillance que révélaient ces mots. Sa main caressait la mienne. Elle soupira :

— Êtes-vous enfant, Pascal ! on ne se figure pas un pareil enfant.

— Grondez-moi, Geneviève, grondez-moi comme du temps où je n’étais pas sage… vous preniez une grosse voix si douce ! je me serais roulé à vos pieds. Mon Dieu ! comme on est bien ici !

Nous nous tûmes. Le silence fut délicieux, cette fois-là, conforme aux désirs de mon cœur et aux pensées inconnues qui palpitaient en moi. Dans l’obscurité je devinais ses yeux fixés à mes yeux.

— Venez, Pascal, me dit-elle.

Le lendemain pendant le dîner, Mme Darzas recevait un télégramme. Elle lut tout haut : Arriverai dix heures. Philippe.

— Aujourd’hui ! m’écriai-je d’une voix si altérée que mère me regarda.

— Eh bien, quoi ? cela te contrarie ?

Malgré tous mes efforts, le repas terminé, je ne pus parler à Geneviève sans que ma mère intervint sous un prétexte quelconque. A la fin je m’enfuis dans le parc, et, ramassant un bâton, je tuai des fleurs et blessai des arbustes.

Le bruit d’une voiture me ramena, Je rentrais au moment où Philippe traversait le vestibule et marchait vers sa femme, les bras tendus. Longue-