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VII

Darling

L’existence de Dominique et Patrice Martyl avait en huit jours subi une transformation radicale. Bouleversement moral dont ils ne parlaient pas. Bouleversement physique dont l’état de santé de la jeune femme était le prétexte plutôt que le vrai motif.

En apparence, pour respecter la cure de repos et d’isolement prescrite à Dominique par le docteur Mauger, Patrice n’entrait plus dans la chambre de sa femme ; il couchait sur un divan-lit dans son cabinet de travail.

C’est là qu’il passait toutes les heures que la vie lui permettait de rester chez lui. Il avait continué, comme si de rien n’était, ses occupations d’avocat en vue, moins actives d’ailleurs à cette époque de l’année. Il recevait de neuf heures à onze heures et demie. Puis il déjeunait seul, en hâte, afin d’aller au Palais de bonne heure, que ce fût ou non nécessaire. Il ne voyait Dominique qu’au diner, qu’ils prenaient en commun pour sauver la face devant les domestiques. Alors tous deux s’efforçaient à une conversation naturelle, normale, cordiale, et qui ne traitait que de choses indifférentes. Puis Dominique, taciturne et lasse, se retirait dans sa chambre où elle lisait sans prendre grande attention aux mots imprimés, tant ses préoccupations intimes l’absorbaient.

Patrice, lui, sortait parfois, mais le plus souvent regagnait son cabinet pour travailler. Travaillait-il ? Oui, il tâchait, mais avec combien de peine ! Et qu’elles étaient fréquentes les heures où il