Page:Lebrun - Explication littérale historique et dogmatique des prières et des cérémonies de la messe - Tome 1 (1843).djvu/20

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voyait tous les jours revenir à l’Église un grand nombre de personnes, qui dès leur enfance avaient entendu célébrer les offices en leur langue maternelle, et à qui les ministres avaient dit cent fois que la Liturgie Romaine était pleine d’impiétés. Comment se dispenser de leur faire lire cette Liturgie dans une langue qu’ils pussent entendre ? M. Pélisson, qui après avoir goûté les douceurs de la Catholicité, savait parfaitement de quelle consolation était aux nouveaux réunis la lecture de ce qui se dit à la Messe, agissant de concert avec la Cour et les Évêques, fit imprimer et distribuer dans le Royaume un Missel latin et français en 1676, en cinq petits volumes. Il fit imprimer la même année, séparément, l’Ordinaire de la Messe avec de courtes prières, que M. l’Évêque de Saintes, en 1681, et d’autres évêques dans la suite firent réimprimer dans leurs diocèses. Enfin, depuis les éditions qui en furent faites par ordre du Roi en faveur des nouveaux convertis, après la révocation de l’édit de Nantes en 1685, il s’en est répandu toutes les années une si grande quantité, avec l’autorité des évêques, qu’il n’est plus question à présent d’examiner s’il est à propos de le mettre en langue vulgaire, et si on le doit laisser lire au peuple. C’est une chose établie. On le trouve entre les mains de tout le monde ; et l’on ne doit plus s’occuper qu’à leur en donner, par une explication exacte, autant ou plus de respect qu’on avait voulu leur en inspirer par le secret dans lequel on le conservait. C’est ce qui a déterminé plusieurs personnes de distinction à demander avec empressement l’Ouvrage qu’on donne ici.

Dès que je m’y appliquai sérieusement, je reconnus qu’on n’entrait point exactement dans le vrai sens des paroles de la Messe, qu’en les expliquant toutes mot à mot ; que le principal défaut de tous les traités qui s’étaient faits sur la Messe, venait de ce qu’on ne l’avait jamais entièrement expliquée[1] ; qu’on avait donné des explications sur de simples conjectures ; qu’il fallait tâcher de marquer quelles vues avait eues l’Église ; qu’il fallait tirer, autant qu’il était possible, des Pères, des plus anciens écrivains

  1. Gabriel Biel, vers la fin du quinzième siècle, entreprit d’expliquer en latin tous les mots du Canon : mais il a chargé son Commentaire de tant de questions et d’autorités scolastiques, qu’il perd, et fait perdre souvent de vue le vrai sens de la lettre ; et qu’il se trouve peu de lecteurs qui aient la patience d’aller jusqu’au bout.