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dianora

rence et Pise. La République florentine l’emportait en éclat et en puissance, et Pise, autant par le souvenir de sa gloire passée que par cet air superbe que conservent toujours les grandeurs déchues ; mais l’esprit actif et aventureux des Lucquois, l’étendue de leur commerce et l’amitié de l’empereur donnaient à leur ville une célébrité qu’elle allait bientôt porter au plus haut point sous la domination de Castruccio. Dans cette cité de gentilshommes marchands et belliqueux, — épithètes qui d’ordinaire ne vont point de compagnie, — vivait, en 1279. une jeune fille de haute naissance, nommée Dianora de Castracani. Ses parents étant morts durant sa première jeunesse, elle habitait, sous la garde d’une sœur aînée de son père, une grande maison de sombre apparence, dans la rue Saint-Benoît de Postella, non loin de l’église Saint-Martin de Lucques ; mais comme elle joignait à une beauté attendrissante les plus belles manières du monde, son nom était dans toutes les bouches, et l’amour de sa personne dans tous les cœurs.

Parmi les jeunes cavaliers qui s’empressaient sur ses pas aux églises et aux promenades, on distinguait surtout deux gentilshommes des mieux faits et des plus considérés de Lucques. L’un s’appelait Bonaccorso de Cenami ; l’autre, Pierre de Puccinelli, appartenait à une famille aussi noble, quoique moins riche. Tous deux étaient jeunes encore, d’une