Page:Leconte de Lisle - Eschyle (Lemerre, 1872).djvu/181

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Klytaimnestra.

Depuis longtemps j’ai fait éclater ma joie, dès que le nocturne messager de flamme nous eut annoncé la prise et la ruine de Troia. Alors, on m’a dit, en me blâmant : — Penses-tu, sur la foi de ces torches enflammées, que Troia soit maintenant saccagée ? Être ainsi soudainement transportée de joie est bien d’une femme ! — Selon de telles paroles, certes, j’étais insensée. Cependant, je fis des sacrifices, et, de toutes parts, dans la Ville, des voix joyeuses, à la façon des femmes, élevaient des actions de grâces dans les temples des Dieux, et chantaient à l’instant où s’assoupit la flamme odorante de l’encens consumé. Maintenant, est-il nécessaire que tu me racontes le reste ? J’apprendrai tout du Roi lui-même. Je vais me hâter de recevoir pour le mieux l’Époux vénérable qui revient dans sa patrie. En effet, quel jour plus doux pour une femme que celui où, un Dieu ramenant son mari sain et sauf de la guerre, elle lui ouvre les portes ? Va dire à mon époux qu’il vienne promptement, selon le désir des citoyens, et qu’il retrouvera dans ses demeures sa femme fidèle, telle qu’il l’a laissée, chienne de la maison, douce pour lui, mauvaise pour ses ennemis, semblable à elle-même en tout le reste et n’ayant violé aucun sceau, pendant un si long temps. Je ne connais pas plus les plaisirs et les entretiens coupables avec un autre homme, que je ne connais la trempe de l’airain.

Talthybios.

Une telle louange de soi-même, quand elle est pleine