Page:Leconte de Lisle - Poèmes barbares.djvu/56

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Dans le Vide éternel interrompant son rêve,
L’Être unique, le grand Taaroa se lève.
Il se lève, et regarde : il est seul, rien ne luit.
Il pousse un cri sauvage au milieu de la nuit :
Rien ne répond. Le temps, à peine né, s’écoule ;
Il n’entend que sa voix. Elle va, monte, roule,
Plonge dans l’ombre noire et s’enfonce au travers.
Alors, Taaroa se change en univers :
Car il est la clarté, la chaleur et le germe ;
Il est le haut sommet, il est la base ferme,
L’œuf primitif que Pô, la grande Nuit, couva ;
Le monde est la coquille où vit Taaroa.
Il dit : — Pôles, rochers, sables, mers pleines d’îles,
Soyez ! Échappez-vous des ombres immobiles ! —
Il les saisit, les presse et les pousse à s’unir ;
Mais la matière est froide et n’y peut parvenir :