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LA MONADOLOGIE

SOMMAIRE

I

La Monadologie est un des derniers écrits de Leibniz, puisqu’elle fut composée pendant le séjour qu’il fit à Vienne en 1714. C’est un résumé de toute la philosophie de Leibniz écrit, comme l’indique le sous-titre, en faveur du prince Eugène. Il faut donc voir dans cet ouvrage le testament philosophique de Leibniz.

Sa Théodicée avait paru en 1710. C’était le seul grand ouvrage que Leibniz eût encore publié. On sait que les Nouveaux Essais ne devaient paraître que cinquante ans après sa mort, en 1765. La Théodicée, où se trouvaient développées la plupart des théories métaphysiques dispersées dans la foule des articles de revues et écrits de circonstance qui avaient valu à Leibniz une réputation européenne, mit le sceau à cette réputation. Le nom de la dernière reine de Prusse, Sophie Charlotte, qui avait été l’instigatrice de l’œuvre et presque la collaboratrice de Leibniz, était une haute recommandation pour l’un et pour l’autre et protégeait l’ouvrage et l’auteur contre l’indifférence des hommes de cour pour la métaphysique. Le prince Eugène se piquait de philosophie et désira que Leibniz rendît la sienne plus accessible en l’abrégeant ; la vie des camps ne laisse pas assez de loisirs pour de longues lectures, et il faut avouer que la Théodicée, avec ses citations et ses digressions, ne pouvait que gagner à être abrégée. On raconte que le prince Eugène trouva la Monadologie si fort à son gré, qu’il en enferma le manuscrit dans une cassette, ne consentant jamais à le communiquer à personne, et le traitant comme un dévot une relique.

Le prince Eugène avait raison de regarder la Monadologie comme un joyau précieux ; ce mince volume contient le résultat de plus de cinquante années de méditation. Depuis 1684, Leibniz était en possession des principes de son système et tra-