Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/109

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ner ses contemporains. Il a vécu en partie de ce métier-là pendant des années et, semble-t-il, le reste de sa vie, à l’exception des années passées en Suisse, en Angleterre et en Dauphiné. Et le plaisir d’étonner est bien évident : mais, très réellement aussi, cette occupation, qui d’ailleurs ne l’assujettit point, est conforme à son goût. Il est paresseux et calligraphe.

Remarquez que les poètes ont presque tous de magnifiques écritures et s’y complaisent. Les manuscrits de Racine, de Hugo, de Leconte de Lisle, de Hérédia sont admirables. De même ceux de Rousseau. Il faisait lui-même, pour ses amies, des copies calligraphiées de ses ouvrages. Il a copié deux fois — pour madame d’Épinay, pour madame de Luxembourg, — les douze cents pages de la Nouvelle Héloïse ; il a copié au moins trois fois, les cinq cent quarante pages de ses Dialogues. Cet ancien apprenti graveur aimait à tracer de beaux caractères, surtout quand ces beaux caractères formaient des phrases dont il était l’auteur. Mais on peut prendre plaisir aussi à dessiner de belles notes, avec de belles clefs, de belles accolades, de belles croches, de beaux dièzes… Le jeune Marseillais Eymar s’émerveillera, en 1774, sur la perfection des copies musicales de Rousseau.

Cette espèce de « conversion » de Jean-Jacques n’avait évidemment pas grand rapport avec celle de Pascal ou de Rancé. Aussi jamais réforme morale