Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/166

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d’œil attendrissant, et qu’on ne vît quelquefois couler dans le parquet des larmes de joie et de souvenir, capables d’en arracher à un spectateur sensible… Je voudrais que tous les ans, au dernier bal, la jeune personne qui, durant les précédents, se serait comportée le plus honnêtement et aurait plu davantage à tout le monde, fut honorée d’une couronne par la main du magistrat, et du titre de reine du bal, qu’elle porterait toute l’année. Je voudrais qu’à la clôture de la même assemblée on la reconduisît en cortège, etc..

(Holà ! et l’égalité, monsieur, et l’égalité !)

Ô Sparte ! ô Lycurgue ! ô Plutarque ! Ô présence du « magistrat » là où il n’a que faire ! Ô publicité et réglementation des sentiments intimes et des scènes familiales !

Comme Rousseau, par ses deux premiers Discours donnera son vocabulaire à la Révolution, par la Lettre sur les spectacles il donnera à la Révolution ses fêtes, — de même qu’il lui donnera, par le Contrat social, sa conception de l’État.

Sur le fond même de la Lettre sur les spectacles, je crois bien, comme Rousseau, que le théâtre ne peut rien, ou ne peut pas grand’chose, pour corriger les mœurs ; mais peut-il tant que cela pour les corrompre ? Je ne sais, personne ne sait. Oh ! que de distinguo il faudrait ici ! Généralement, le théâtre ne réussit qu’en se conformant à la morale du public assemblé ; et c’est presque toujours ce qu’il fait. Il ne vaut que ce que vaut le public lui-même. — Rousseau, qui croit les choses mauvaises à proportion qu’elles s’éloignent de l’état de nature,