Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/179

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chale de Luxembourg pour le ton et l’usage du monde. » Ainsi s’exprime le prince de Ligne. La maréchale eut l’esprit de mourir en 1787.

Son rôle mondain impliquait une rapide intelligence des hommes, beaucoup de tact et de souplesse. Elle n’eut aucune peine à prendre Jean-Jacques, et elle lui fut bien meilleure que n’avait été l’inquiète et tourmentante madame d’Épinay, d’ailleurs grande dame de second ordre. Avec l’ombrageux Jean-Jacques, la maréchale fut toute simplicité, toute sérénité, toute tolérance, montra une admiration qui semblait absolument involontaire et se garda d’avoir trop d’esprit. — L’agréable portrait qu’il nous fait d’elle se termine ainsi : « Je crus m’apercevoir, dès la première visite, que, malgré mon air gauche et mes lourdes phrases, je ne lui déplaisais pas. »

Il ne lui déplaisait pas. Il avait pour lui sa bizarrerie, sa réputation d’ours de génie, son étrange talent (et de tout temps les belles dames ont aimé avoir chez elles leur homme célèbre). Mais en outre il faut bien admettre que sa personne avait, non seulement de la saveur, mais un charme réel : car nous voyons que jamais les enthousiastes de ses livres ne se sont refroidis sur lui quand ils l’ont connu, — ou que le refroidissement n’est venu qu’à la longue.

Voilà donc, encore une fois, Rousseau captif et obligé d’un grand seigneur et d’une grande dame. Il accepte de loger dans un délicieux petit château