Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/185

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tant, il ne peut plus vivre, dirait-on, qu’avec ces coûteux aristocrates, ces scandales de richesse et ces scandales d’inégalité… Il est permis à un pauvre sceptique de voir tout le monde : mais à un apôtre !

Nous sommes de faibles créatures, et nous devons tâcher de comprendre toutes les contradictions. Mais il y en a aussi de trop « voyantes », de trop éhontées, et que, vraiment, un peu de probité et de bon goût devrait faire éviter ! Je n’aime pas plus Rousseau chez les Luxembourg que je n’aime un socialiste millionnaire, un gentilhomme anarchiste ou un prêtre qui fait le badin et l’émancipé.

Mais eux, de leur côté, ces princes, ces ducs et duchesses, ces comtesses et ces marquis, — dans un temps où ces noms signifiaient quelque chose, — qu’ont-ils affaire avec Jean-Jacques ? Rien que pour vivre, pour rester ce qu’ils sont, ils ont besoin de l’ordre social et politique d’alors, et ils ont besoin de l’Église. Qu’ils se soucient du bien public, qu’ils soient, politiquement, avec Voltaire, avec Montesquieu, plus tard avec Turgot, c’est bien. Mais cet excentrique, ce détraqué les menace directement et dans ce qu’ils ont de plus précieux ; il menace la vie élégante ; il menace, de loin, la propriété même, et tout l’ordre existant, et l’Église et l’éducation traditionnelles et nationales. Et ils le trouvent bizarre, mais sympathique, et ils l’accablent de caresses. — Est-ce donc qu’ils pous-