Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/231

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hommes ne sont pas faits pour être entassés en fourmilières, mais épars sur la terre qu’ils doivent cultiver… Les villes sont les gouffres de l’espèce humaine. »

« Pour qu’un enfant pût être bien élevé, a dit Jean-Jacques dans le passage des Mémoires de madame d’Épinay que je rappelais tout à l’heure, il faudrait commencer par refondre la société. » Or, on ne le peut pas. Donc, pour empêcher que la société ne corrompe en lui la nature, il n’y a qu’un moyen : c’est de l’isoler de la société, — et même de ses parents, nécessairement imbus de préjugés sociaux, — et de le confier totalement à un précepteur, avec qui il devra passer sa vie.

Ceci nous amène aux conditions requises pour le précepteur ou « gouverneur ».

Un gouverneur ! s’écrie Rousseau. Oh ! quelle âme sublime !… En vérité, pour faire un homme, il faut être père ou plus qu’homme soi-même.

Le gouverneur doit être jeune, pour devenir, à l’occasion « le compagnon de son élève ». Il ne sera pas appointé. Ce sera un ami des parents, célibataire et de loisir, qui, par goût, se chargera de l’éducation de l’enfant, et consacrera à cette tâche la meilleure partie de son existence.

Pour moi, je lis ces choses-là avec un peu d’inquiétude. On ne peut pas dire ici : « C’est sans doute un système idéal d’éducation, mais duquel on peut rapprocher, dans une certaine mesure,