Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/268

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Bref, c’est le peuple qui décidera ce qu’il convient de laisser de liberté et de biens à chaque citoyen ; et cela fait frémir.

(Et pourtant, dans ce même Contrat social, Rousseau refuse au peuple la prévoyance et la clairvoyance, et l’appelle « une multitude aveugle, qui souvent ne sait ce qu’elle veut, parce qu’elle sait rarement ce qui lui est bon. »)

3º Troisièmement et corollairement, le système implique le droit illimité du peuple souverain, même sur la conscience. Le peuple impose sa loi, même en matière philosophique et théologique. Jean-Jacques rétrograde jusqu’à Calvin. Il rétablit l’union du temporel et du spirituel, dont la séparation avait été, selon Auguste Comte, le chef-d’œuvre du moyen âge.

Il y a, dit-il, une profession de foi purement civile, dont il appartient au souverain (au peuple souverain) de fixer les articles, non pas précisément comme dogmes de la religion, mais comme sentiments de sociabilité sans lesquels il est impossible d’être bon citoyen ni sujet fidèle.

Il indique les dogmes de cette religion civile : « l’existence de la divinité puissante, intelligente, bienfaisante, prévoyante et pourvoyante, la vie à venir, le bonheur des justes, le châtiment des méchants, la sainteté du contrat social et des lois ». Et il conclut ainsi sur ce point :

…Sans pouvoir obliger personne à croire à ces dogmes, le peuple peut bannir de l’État quiconque ne les croit