Page:Lemaître - Les Contemporains, sér1, 1898.djvu/140

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hommes politiques parlent de république athénienne comme s’ils savaient ce qu’ils disent. Quand M. Taine raisonne de l’art grec, on sent, sous ses déductions solidement emboîtées et sous l’éclat dur de son style de poète-logicien, un cœur qui se fond en tendresse, et M. Renan fait, sur l’Acropole, sa troublante prière à Pallas Athènè. À mesure que monte la démocratie, que l’on dit inélégante, les âmes délicates se tournent avec d’autant plus d’adoration vers les pays et vers les siècles de la beauté irréprochable et de la vie harmonieuse. Comme autrefois Ronsard et ses amis immolaient en pompe un bouc à Iacchos, plusieurs de nos contemporains offriraient volontiers à quelque statue de Vénus anadyomène ou de Vénus victorieuse, non une génisse ou une brebis, mais des fruits, du lait et du vin, en chantant sur un air de Massenet des vers de Leconte de Lisle.


I

Ce rêve grec, personne ne l’a embrassé avec plus de ferveur, nourri avec plus de prédilection, exprimé avec plus d’enthousiasme ; personne n’a mieux ramené et rattaché à ce rêve antique ses sentiments et ses pensées même les plus modernes ; personne n’a mieux donné à cette pitié d’artiste l’apparence d’un culte moral et d’une foi directrice de la vie ; personne ne s’est mêlé avec plus de joie à la procession des