Page:Lemaître - Les Contemporains, sér1, 1898.djvu/301

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particulier. Lui, serait un étudiant, ou un rapin, ou un commis en nouveautés. L’histoire commencerait, j’imagine, à Bullier, se dénouerait dans quelque autre coin non moins réel, et il y aurait beaucoup de choses vues et, autour de l’action, beaucoup de petits détails significatifs, attendrissants, pittoresques ou cruels. Mais, au fait, j’y songe : les trente premières pages de Sapho, qu’est-ce autre chose que la Courtisane amoureuse accommodée au goût d’à présent ?

Ce qui nous plaît n’est donc plus tout à fait ce qui plaisait à nos pères, et tout d’abord le conte, chez M. de Maupassant, est devenu réaliste. Parcourez ses données : vous reconnaîtrez dans presque toutes un petit fait saisi au passage, intéressant à quelque titre, comme témoignage de la bêtise, de l’inconscience, de l’égoïsme, parfois même de la bonté humaine, ou réjouissant par quelque contraste imprévu, par quelque ironie des choses, dans tous les cas quelque chose d’arrivé, ou tout au moins une observation faite sur le vif et qui peu à peu a revêtu dans l’esprit de l’écrivain la forme vivante d’une historiette.

Et alors, au lieu des muletiers, jardiniers et manants des anciens contes, au lieu de Mazet et du compère Pierre, nous avons des paysans et des paysannes comme maître Vallin et sa servante Rose, maître Omont, maître Hauchecorne, maître Chicot et la mère Magloire, et combien d’autres (Une fille de ferme, la Ficelle, les Sabots, le Petit fût, etc.) !