Page:Lemaître - Les Contemporains, sér2, 1897.djvu/313

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pu être ensuite ses faiblesses, a accompli, le jour où il s’est couché tout de son long au pied de l’évêque qui le consacrait, la plus entière immolation de soi que l’on puisse imaginer ; qu’il s’est élevé, à cette heure-là, au plus haut degré de dignité morale, et qu’il a été proprement un héros, ne fût-ce qu’un instant. Et qu’on ne dise pas : « Cela n’est rien, c’est très facile ; ils font cela pour être mieux récompensés au ciel. » Car l’espoir d’un petit surcroît de félicité dans la béatitude absolue (chose d’ailleurs contradictoire) ne saurait provoquer un tel effort ; ou bien, si je ne m’étonne plus du sacrifice, ce qui m’étonnera, ce sera la profondeur et l’intensité du sentiment, amour ou foi, qui le rend facile ; et cela reviendra au même. Des hommes qui ont été un jour capables soit de cet effort, soit de cet élan, en restent pour toujours respectables et sacrés. Et pensez un peu à ce que c’est que la continence absolue, la nécessité de promener partout sa robe noire, le renoncement à toutes les curiosités de l’esprit, l’idée que l’on porte un signe indélébile et qu’on ne s’appartiendra jamais plus. Rien que d’y songer, cela fait froid. Non, non, ceux qui méprisent ou raillent les prêtres ne les comprennent point.

J’ai essayé d’indiquer quelle éducation il faudrait avoir reçue et par où il faudrait ensuite avoir passé pour être en état de les comprendre et de les peindre. Ne dites pas que j’en cherche un peu long. C’est un être si spécial qu’un prêtre, et si différent des autres hommes ! Dès l’enfance on le prend, on l’isole du