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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.

En 1831, Lamartine s’étant présenté à la députation fut odieusement attaqué par la Némésis. Il répondit par des strophes indignées, sublimes. La réplique de Barthélemy et Méry ne les disculpe pas, mais elle contient la plus belle page qu’ils aient écrite. Nous donnons les trois pièces du procès, en restituant à la dernière stance de Lamartine les vers qui la terminaient dans l’édition primitive, à la place de ceux qu’il y substitua plus tard par un scrupule de modestie que seul il était en droit de ne point avoir.

Les œuvres écrites en collaboration par les deux poètes sont éditées par MM. Garnier frères.

A. D.
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À MONSIEUR DE LAMARTINE




Je me disais : Donnons quelques larmes amères
Au poète qui suit de sublimes chimères,
Fuit les cités, s’assied au bord des vieilles tours,
Sous les vieux aqueducs prolongés en arcades,
Dans l’humide brouillard des sonores cascades,
            Et dort sur l’aile des vautours.

Hélas ! toujours au bord des lacs, des précipices,
Toujours comme on le peint devant ses frontispices,
Drapant d’un manteau brun ses membres amaigris,
Suivant de l’œil, baigné par les feux de la lune,
Les vagues à ses pieds mourant l’une après l’une,
            Et les aigles dans les cieux gris.

Quelle vie ! et toujours poète suicide
Boire, et boire à longs flots une existence acide ;
Ne donner qu’à la mort un sourire fané ;