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SAINT-CYR DE RAYSSAC.


Blanche divinité, fille du sentiment,
C’est ton unique amour qui troubla ma jeunesse.
Dès que je te connus, je te cherchai sans cesse,
Et ton premier baiser fut mon premier tourment ;

Aussi, je vais à toi, désespérante amie ;
Je vais sur cette terre où tu fus tour à tour
La force et la splendeur, la grâce et l’harmonie ;

Immortelle beauté, puissé-je à mon retour,
Quand j’aurai mis mon front sur ta bouche endormie,
Emporter le secret pour te créer un jour !




UNE PIETA


Oh ! non, pas un blasphème et pas un désaveu ;
Mais je tombe, Seigneur, et je me désespère,
Mais quand ils ont planté le gibet du Calvaire,
C’est dans mon cœur ouvert qu’ils enfonçaient le pieu.

Crois-tu que je t’aimais, moi, dont le manteau bleu
T’abrita quatorze ans comme un fils de la terre ?
Oh ! pourquoi, juste ciel, lui donner une mère,
Qu’en avait-il besoin puisqu’il était un Dieu ?

L’angoisse me dévore ; au fond de ma prunelle
Roule toujours brûlante une larme éternelle
Qui rongera mes yeux sans couler ni tarir.

Seigneur, pardonnez-moi, je suis seule à souffrir :
Ma part dans cette épreuve est bien la plus cruelle,
Et je peux bien pleurer sans vous désobéir.