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ÉMILE BERGERAT.


XVIII


« Enfant, pardonne-moi ! Car mon crime est réel
« De n’avoir lu ni Kant, ni Gœthe, ni Hegel !
« Aux élèves qu’ils font on reconnaît des maîtres !
« Sottement j’enseignais aux miens dans mes leçons :
— « Le bon Dieu fit le fer pour couper les moissons ! »
« Et je faussais vos cœurs, ô naïfs petits êtres !


XIX


« Le fer est le métal de mort, sachez-le bien !
« La mort étant le but, le fer est le moyen ;
« Il s’assouplit au meurtre et brille dans les larmes !
« Dieu l’a fait pour qu’il gronde et qu’il lance le feu ;
« Aussi, mes chers petits, il faut adorer Dieu,
« Qui pour vous égorger vous a donné des armes !


XX


« Je leur dirai cela dans la forêt, là-bas,
« Car j’y vais retourner ! En ne te voyant pas,
« Ils vont me demander : « Mais elle, où donc est-elle ? »
« Je leur expliquerai qu’il ne faut plus t’aimer !
« Et, si je puis le dire enfin sans blasphémer,
« Que tu n’étais ni bonne, ô mon ange, ni belle !