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MAURICE ROLLINAT.


Ils font grelotter sans répit
La Misère au front décrépit,
Celle qui rôde et se tapit
          Blafarde et maigre,
Sans gîte et n’ayant pour l’hiver
Qu’un pauvre petit châle vert
Qui se tortille comme un ver
          Sous la bise aigre.

Frisson de vie et de santé,
De jeunesse et de liberté,
Frisson d’aurore et de beauté
          Sans amertume ;
Et puis, frisson du mal qui mord,
Frisson du doute et du remord,
Et frisson final de la mort
          Qui nous consume !


(Les Névroses)


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LE GOÛT DES LARMES





L’énigme désormais n’a plus rien à me taire,
J’étreins le vent qui passe et le reflet qui fuit,
Et j’entends chuchoter aux lèvres de la Nuit
La révélation du gouffre et du mystère.

Je promène partout où le sort me conduit
Le savoureux tourment de mon art volontaire ;
Mon âme d’autrefois qui rampait sur la terre
Convoite l’outre-tombe et s’envole aujourd’hui.