Page:Lemerre - Anthologie des poètes français du XIXème siècle, t3, 1888.djvu/247

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
227
PAUL DÉROULÈDE.

 Quand enfin le cri se jette :
« En marche ! À la baïonnette ! »
Et l’on entre sous le bois.

À la première décharge,
Le Clairon sonnant la charge
Tombe frappé sans recours ;
Mais, par un effort suprême,
Menant le combat quand même,
Le Clairon sonne toujours.

Et cependant le sang coule,
Mais sa main, qui le refoule,
Suspend un instant la mort,
Et, de sa note affolée
Précipitant la mêlée,
Le vieux Clairon sonne encor.

Il est là, couché sur l’herbe,
Dédaignant, blessé superbe,
Tout espoir et tout secours ;
Et sur sa lèvre sanglante
Gardant sa trompette ardente,
Il sonne, il sonne toujours.

Puis, dans la forêt pressée,
Voyant la charge lancée
Et les Zouaves bondir,
Aiors le Clairon s’arrête ;
Sa dernière tâche est faite,
Il achève de mourir.


(Chants du Soldat)


____________