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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.

œuvre. Van Eyck en eût fait un tableau, et La Fontaine, le fin Champenois, eût embrassé l’auteur.

Au nombre des pages les plus remarquables des Poèmes de Provence on doit citer Le Rhône, comme inspiration, mouvement et couleur. Le poète est bien là dans son véritable élément, et ce volume est certainement une de ses plus belles œuvres.

Les poésies de M. Jean Aicard ont été publiées chez MM. G. Charpentier, Lemerre, Fischbacher, Chamerot, Delagrave et Ollendorff.

André Lemoyne.

AMOURS



De tout temps mes amours furent des songes vagues ;
Je n’ai parlé tout bas qu’aux nymphes, dans les bois,
Et, sur le bord des mers, ces sirènes, les vagues,
Me font seules vibrer aux accords de leur voix.

Mon âme est fiancée à l’humble solitude :
Son chaste baiser plaît à mon front sérieux ;
Je connais de profonds ombrages où l’étude
À des charmes plus doux pour l’esprit et les yeux.

Je suis l’amant rêveur des récifs et des grèves,
L’insatiable amant du grand ciel inconnu ;
Je ne retrouverai la vierge de mes rêves
Qu’en l’immortel pays d’où mon cœur est venu.

La vertu de l’amour, l’homme en a fait un crime !
Je ne veux pas aimer comme on aime ici-bas,
Et ce cœur, façonné pour un élan sublime,
Tant qu’il pourra monter ne se posera pas !