Page:Lemoyne - Œuvres, Une idylle normande, 1886.djvu/173

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d’encens, de myrrhe ou de benjoin qui vous prend les narines, comme sous les piliers d’une église, mais le subtil et tonique esprit de la vigne qui vous pénètre et vous réconforte. Peu à peu le jour se fait ; on commence à voir clair ; et, dans une pensée quasi-religieuse, on suppute l’âge et le nom de ces belles eaux-de-vie, gloire de nos aïeux, qui vieillissent en paix dans leur bon fût de chêne solidement cerclé ; les unes presque blanches, d’autres jaune paille ou couleur d’ambre, de trente, quarante, et même soixante ans, sans aucun mélange adultère ; provenant des vignes fameuses qui s’étalent au soleil sur les deux bords de la Charente, soit dans les régions calcaires et crayeuses de la rive gauche, reconnues comme les plus favorables (Gimeux, Mainxe, Segonzac), donnant la grande et la petite champagne ; soit dans les terrains jurassiques et un peu argileux fournissant les premiers et les seconds bois (le Cluzeaux, Cigogne, Mérignac) ; puis les Borderies, provenant de vignes encadrées sans doute par une lisière de forêts du temps de nos ancêtres ; — et jusqu’à des échantillons de crus inférieurs, tels que les eaux-de-vie de Surgères et d’Aigrefeuille, destinées à des amateurs moins gourmets ou moins fortunés.

Tout s’y rencontrait, avec certificat d’origine et extrait de naissance.