Page:Lemoyne - Œuvres, Une idylle normande, 1886.djvu/274

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pas de s’y ménager une petite ouverture, dans le cas où il lui plairait d’y couler son œil.

Le comte entra mouillé, soucieux et d’assez méchante humeur.

— Dieu ! comme vous voilà fait, mon pauvre monsieur Albert, s’écria Germaine en joignant les mains et réprimant à grand’peine un sourire. Venez donc vous réchauffer.

Et jetant dans l’âtre une brassée d’ajoncs secs et de menues brindilles pétillantes, elle fit une large flambée au chasseur ruisselant.

— Il y a du nouveau, n’est-ce pas, Germaine ? dit Albert anxieux, en apercevant un magnifique piano d’Érard, qui tenait toute la place entre la porte d’entrée et la première fenêtre.

— Sans doute, mais asseyez-vous d’abord, et commencez par sécher vos guêtres. Surtout ne regardez pas d’un air sournois ce pauvre meuble, qui ne vous a fait aucun mal. Cinq minutes plus tôt, vous auriez pu voir le musicien, la musicienne, veux-je dire. Elle sort d’ici.

— Ah ! fit Albert sur le ton de la plus parfaite indifférence. Et l’Anglais ?

— Il n’y a plus d’Anglais. Ce brave M. Wilson (que Dieu ait son âme originale !) ne voyagera plus dans notre monde. Il est parti pour le grand voyage. N’a-t-il pas eu la fantaisie de laisser par testament vingt mille francs