Page:Lemoyne - Œuvres, Une idylle normande, 1886.djvu/296

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aveugle pourtant. D’une part, Mlle d’Évran m’avait dit que le pays pittoresque et accidenté lui plaisait ; d’autre part, mon homme d’affaires, venu cinq ou six fois dans la contrée, avait préalablement flairé le terrain ; je savais, à n’en pouvoir douter, que tous les immeubles étaient d’un très bon rapport ; j’étais donc sûr de ne pas m’enliser dans une mauvaise entreprise. Mais, pour en revenir à votre désir personnel, demain, dans l’après-midi, si vous le voulez bien, nous ferons ensemble une promenade aux ruines. Je prendrai l’avis de Mme Grandperrin, consulterai Mlle d’Évran, et si rien ne s’y oppose…

— Pour ma part, dit Mlle Alise, je connais déjà ces ruines, je ne vois aucune objection à leur vente partielle, et je pense également que ma mère…

Mme d’Évran l’approuva d’un signe de tête, le comte Albert la remercia d’un éloquent regard, et une vive rougeur lui empourpra les joues. L’espoir renaissait en lui. En quelques instants ce ne fut plus le même homme, sa brusque sauvagerie s’humanisa, et il semblait presque heureux quand on se leva de table pour prendre le café dans la chambre voisine, où l’on apercevait le piano de Mme Gerbier, deux petites tables de jeu avec leur tapis vert, et des albums de photographies à tranches