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derrière les vieux murs en ruines

Le lettré s’arrête et paraît fort gêné.

— Ô lettré ! il fallait le battre.

— Allah !… J’ai voulu lui donner quelques petits coups de baguette sur la plante des pieds, mais aussitôt, — hachek ! — il a fait voler son eau sur moi !… Puis il s’est roulé à terre en poussant des cris affreux, comme si on le sciait en deux.

— Où est-il à présent, ce vaurien ?

— J’ai fermé l’école avec ma clé, laissant les élèves sous la surveillance de mon fils, et je suis venu prévenir le hakem… Cet enfant l’emporte sur moi !

Pour un peu, le lettré se mettrait à pleurer ; ses mains tremblent… d’indignation peut-être… de crainte aussi. Évidemment il a peur que mon mari ne donne raison à l’exécrable Saïd. Je dois le rassurer, et partir moi-même avec lui afin que cette affaire se dénoue, sans plus d’atteinte à son prestige.

Nous avons choisi son école parce que les notables de la ville y envoient leurs enfants. Selon la coutume, elle dépend d’une mosquée, ainsi qu’un hammam où les fidèles se purifient, et la fontaine. Cette mosquée étant parmi les plus anciennes de Meknès, le hammam est noir de crasse, la fontaine a perdu toutes ses mosaïques, et les poutres sculptées, qui soutiennent l’école, fléchissent, près de s’effondrer. Mais, comme toujours en pays musulman, du milieu des ruines surgit une intense vie joyeuse. La vieille école