Page:Leo - Aline-Ali.djvu/347

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— C’est bon à dire, ça ; mais crois-tu point qu’elle va nous donner plus cher qu’elle n’est obligée ? Ça n’est pas comme ça que les choses se font.

— Vous vous trompez, dit en riant Paul, resté par derrière, tout ce que dit Mlle de Maurignan, elle le fait. »

Et il rejoignit Aline, qu’il voyait engagée dans un colloque avec un des moissonneurs.

C’était un homme de haute taille, de ce type gaulois, énergique et fier, qui s’est conservé surtout dans le centre de la France. Les premiers mots qu’il avait adressés à la jeune châtelaine, quand elle lui avait tendu le verre, plein jusqu’aux bords du rouge liquide, avaient été ceux-ci :

« Pas vrai, mam’zelle, quand le maître est une femme, c’est par les femmes qu’on doit commencer ?

— Peu importe que l’on commence par les femmes ou par les hommes, dit la jeune fille ; quand le travail des uns vaut celui des autres, il faut que la récompense soit égale.

— Mam’zelle veut rire : le travail d’une femme ne vaut pas celui d’un homme.

— Pas toujours sans doute, mais ici… Probablement c’est au prix de plus de fatigue, mais elles font leur sillon comme vous. Aussi je veux leur donner un prix égal, car il serait injuste que, faisant le même travail, elles fussent payées près de deux fois moins.

— S…… ! s’écria-t-il, si c’était vrai, je f…… ma faucille sur mon épaule, et je m’en irais chez nous.

— Le bien des autres vous ferait-il mal ? demanda Paul, qui, voyant le ton colère et arrogant de cet homme, intervint.