Page:Leo - Les Deux Filles de monsieur Plichon.djvu/64

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— Je n’étais pour elle qu’un monstre, n’est-ce pas ? dis-je en exprimant la réticence.

Madame Plichon sourit :

— Oui, reprit-elle, si vraiment vous placez l’amour au-dessus de tout, Blanche sera heureuse ; et quelle reconnaissance j’aurai pour vous ! Nous autres femmes, voyez-vous, nous ne demandons que cela, être aimées ; il ne faut pas nous juger d’après les femmes du grand monde, qui sont coquettes et infidèles, à ce qu’on dit. Heureuses ou malheureuses, nous gardons nos devoirs… Il y a sans doute des exceptions ; mais elles sont rares. Et cependant nos maris nous délaissent beaucoup. La lune de miel passée, ils se croient quittes envers nous, et retournent à leurs affaires, à leurs amis, aux commérages politiques ou locaux, à la vie matérielle, hébétante, du café. Nous restons seules, avec nos enfants. La vie cependant est bien froide et bien triste ainsi !

— Je baisai la main de cette charmante et bonne femme, et l’assurai que mon goût et ma raison me porteraient également à être le compagnon et l’ami de Blanche. Nous causâmes comme de vieux amis. Elle me dit :

— Mon mari consentira ; mais il faut attendre quelques jours et ne pas brusquer votre demande. Il n’exigera pas que vous soyez riche ; mais il demandera (et je crois avec raison) que vous ayez une fonction pour vous occuper et pour augmenter vos revenus. Blanche a 50,000 fr. de dot ; ce n’est pas assez pour vivre à l’aise et pour élever des enfants.

— J’y avais déjà pensé, dis-je ; votre fille se mariera