Page:Leon Wieger Taoisme.djvu/530

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lignée. Voilà où l’ignorance des vrais principes, conduit les meilleures gens. — Yang-tchou dit : Yuan-hien fut pauvre à Lou, Tzeu-koung fut riche à Wei. La pauvreté de Yuan-hien abrégea sa vie, la richesse de Tzeu-koung l’usa de soucis. Mais alors, si la pauvreté et la richesse sont également nuisibles, que faire ? Voilà : vivre joyeux, bien traiter son corps, voilà ce qu’il faut faire. Au joyeux, même la pauvreté ne peut nuire (parce qu’il ne s’en afflige pas). A celui qui traite bien son corps, la richesse ne nuira pas non plus (parce qu’il ne s’usera pas de soucis). — Yang-tchou dit : s’aider durant la vie, cesser à la mort ; j’aime cette parole des anciens. J’entends par aider, procurer les aises de la vie, les aliments et le chauffage, tous les secours de la vie. J’entends par cesser à la mort, non la suppression des lamentations d’usage, mais celle des gaspillages tels que la perle ou le jade mis dans la bouche du cadavre, les riches habits, les victimes immolées, les objets offerts au mort.

E. Yen-p’ingtchoung disciple de Mei-ti ayant demandé à Koan-i-ou politicien penchant au taoïsme, comment il fallait traiter les vivants, celui-ci lui répondit : il faut favoriser leurs penchants naturels, il ne faut pas les gêner. — Veuillez détailler davantage, dit Yen-p’ingtchoung. — Voici, dit Koan-i-ou : il faut leur laisser toute liberté d’écouter, de regarder, de flairer, de goûter ; toute licence pour les aises du corps et le repos de l’esprit. Toute restriction mise à quelqu’une de ces facultés, afflige la nature, est une tyrannie. Être libre de toute contrainte, pouvoir satisfaire tous ses instincts, au jour le jour, jusqu’à la mort, voilà ce que j’appelle vivre. Se contraindre, se morigéner, être toujours souffrant, à mon avis, cela n’est pas vivre. Et maintenant que je vous ai dit comment traiter les vivants, veuillez me dire comment traiter les morts. — Les morts, dit Yen-p’ingtchoung, peu importe comment on les traite, (le corps n’étant qu’une défroque usée). Qu’on les brûle, qu’on les immerge, qu’on les enterre, qu’on les expose, qu’on les lie dans de la paille et les jette à la rivière, qu’on les habille richement et les dépose dans un sarcophage ou dans une bière, tout cela revient au même. — Regardant ses amis qui avaient assisté à cet entretien, Koan-i-ou dit : celui-là et moi entendons ce qui en est de la vie et de la mort.