Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/329

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l’église, demeure abîmée dans ses rêveries sans fin, Jeanne, saisie par la fraîcheur qui tombe des voûtes, éprouve un sourd malaise, mais elle ne se plaint pas. Elle regarde trop attentivement et trop tristement les ouvriers qui démolissent cette chapelle de Marie, qui lui paraissait si belle, et qu’elle s’imaginait devoir durer toujours ; son cœur se gonfle de chagrin à voir emporter les grands bouquets de roses qui fleurissaient l’autel. Quand la Vierge, vêtue de dentelles, chancelle et tombe aux mains des ouvriers, Jeanne jette un cri, chancelle et tombe comme la Vierge. Le terrible mal qui lui vient de son aïeule, la folle des Tulettes, la ramène à ce petit lit où, par une nuit paisible, à la clarté faible de la veilleuse brûlant sur la cheminée dans un cornet bleuâtre, sa mère dévêtue, au châle glissant, à la chevelure défaite, s’était rencontrée, pour la première fois, avec un homme dont le veston mal boutonné, laissait voir le cou nu. Toute cette première moitié d'Une Page d’Amour est traitée avec un art de composition et une perfection de touche qu’on ne saurait surpasser. Tout y est à sa place, au point ; pas une dissonance, pas une faute de perspective. Modestement, dans une courte mais ferme préface, l’auteur a été amené, par incidence d’ailleurs, à qualifier son livre, et il l’a défini ainsi : « œuvre intime et de demi-teinte. » Demi-teinte ne semble pas absolument juste : tout étant éclairé comme il convient. Est-ce une figure de demi-teinte que cette épouvantable mère Fétu, geignarde hypocrite, fausse indigente, sensuelle, cupide, gourmande, Macette à l’eau bénite, marmottant, avec des yeux libidineux, des oraisons suspectes et des pollicitations équivoques, mêlant les choses de sacristie aux histoires du boudoir. Ce Mercure femelle, dont le caducée est un chapelet, provoque, au sortir de