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perplexe, attendant des nouvelles, et ne sachant quand il donnerait le signal de l’attaque, ignorant même s’il le donnerait.

LES DÉLÉGATIONS À L’HÔTEL-DE-VILLE

La foule était assez grande sur la place, mais elle semblait plutôt un rassemblement de badauds qu’une troupe prête à se battre. Les bataillons attendus ne venaient pas. L’Alliance, par son manifeste cité plus haut, avait répandu les idées de conciliation. Elle envisageait une entente probable avec le gouvernement. Tout appel à la force était par elle écarté. Elle le montra bien, quand, au lieu de convoquer, comme ses membres l’avaient annoncé, des bataillons en armes, qui eussent enveloppé l’Hôtel-de-Ville, prêts à donner l’assaut et à installer un nouveau gouvernement, elle se contenta d’envoyer une délégation sans armes, et borna son action à la remise d’un placet par un orateur amène. Rien de plus pacifique, ce jour-là, que l’attitude et l’intervention de l’Alliance.

La délégation avait pour porte-paroles Tony Révillon. Avec sa haute taille, sa face léonine et souriante, sa physionomie sympathique et intelligente, qu’un encadrement de longs cheveux, à la mode romantique, dépouillait de tout aspect martial, malgré la moustache gauloise ombrageant la lèvre épaisse et sensuelle, Tony Révillon, journaliste populaire très apprécié, vulgarisateur des faits et gestes de la première République, orateur chaleureux, applaudi dans les clubs, mais qui n’avait de révolutionnaire que l’organe, n’était nullement l’homme qui convenait pour intimider un personnage aussi têtu, aussi féru de son autorité, si désireux de maintenir l’ordre, que l’adjoint Chaudey, auquel il eut affaire. La délégation avait demandé à s’en-